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10 juillet 2018 2 10 /07 /juillet /2018 06:01

(Librairie Plon, 1980)

 

Inutile de présenter Charles de Gaulle. Notre propos étant l’histoire de Roucy, nous vous présentons ci-dessous quelques extraits de ses Lettres, Notes et Carnets écrits lors de son séjour dans le secteur Ventelay – Roucy – La Ville-aux-Bois en 1915.

Lorsque le 3 août 1914, l’Allemagne déclare la guerre à la France, le lieutenant de Gaulle sert au 33e régiment d’infanterie. Le 15 août il est blessé devant le pont de Dinant, en Belgique. Il retrouve son régiment en octobre. En janvier 1915, il sera nommé capitaine.

Page 112.

« 18 octobre (1914).

Départ 7 heures du matin. Arrivée à Ventelay, quartier général du C. d’A. (Corps d’Armée). Déjeuner, puis auto.

Le soir, en route pour Chaudardes où est la division. Vu le général Brulard, très aimable.

Dîner à Chaudardes. On boit du vin nouveau apporté par de Saxcé.

A 11 heures passe le train réglementaire. On monte dedans. En route vu les fusées lumineuses des Allemands.

On s’arrête à Pontavert. Vu le chef de musique Beaumont. De là, colonel à l’angle S.O. du bois de Ville-sous-Bois. Il nous reçoit au champagne et m’annonce la 7e compagnie. Couché chez le commandant Batbedat.

 

19 octobre.

Réveil au canon. Puis tous aux tranchées pour voir les camarades.

A certains endroits à 50 mètres de l’ennemi qui tient toujours le village de La Ville-aux-Bois et les environs.

Déjeuner avec le colonel.

Le soir notre artillerie tire sur les maisons à 50 mètres de notre ligne. Entendu hurler les porcs saignés dans leurs trous…. »

« 13 juin (1915).

Fait route avec 2 sous-lieutenants du 84e.

Arrivés à Jonchery vers 6 heures du matin.

Au Q.G. de l’armée, on nous donne une auto.

Arrivée à Roucy vers 8 heures. Puis à pied jusqu’au Bois Carré. Le colonel est enchanté de me revoir. Déjeuné avec lui. J’ai la 10e compagnie. Passé l’après-midi au Bois Carré.

 

14 juin.

Matinée employée à voir le secteur avec Rives. Dans l’après-midi à ma compagnie qui est au repos depuis ce matin dans le Bois de Pontavert. »

« 21 juin.

Eté faire tirer la compagnie à Ventelay (Aisne). Partis à 2 h 30. Mais il faut être à Roucy de bonne heure car l’ennemi voit très bien. Nous arrivons à Roucy à 4 heures, il fait déjà grand jour. Puis il nous faut monter la côte de Ventelay qui est très vue aussi. Nous la dépassons pourtant sans recevoir un obus. Après le tir je donne repos car on ne doit pas repasser la côte de Ventelay avant la nuit.

Retour à 23 heures.

 

22 juin.

Départ à 2 heures du matin pour la première ligne. Je relève la 2e. Sortons à droite (sud-est) de la route Pontavert-Ville-aux-Bois jusqu’à la clairière du Bois franco-allemand. J’ai nos 4 sections en ligne. Une pourtant fait face au sud-est en flanquant soi-disant la clairière. En réalité elle ne flanque rien du tout étant beaucoup trop enfoncée dans le bois et ne voyant rien. »

« 26 juin.

Je veux pousser ma 4e section à la lisière sud-est du bois des Buttes pour qu’elle voie dans la clairière. Je prépare la chose pour la nuit, donne mes ordres et en rend compte au colonel. Plan : au dernier moment il me fait dire d’attendre.

 

11 juillet 1915.

Je reprends mon carnet interrompu longtemps puisque toujours rien de saillant ne se passe.

J’ai tout de même fini par passer des ouvrages à la limite du bois des Buttes. Compliments du patron, de Spitz, etc. Ce sont les « Ouvrages de Gaulle ».

Puis été au Lavoir, puis à la Sablière où reçu à déjeuner le colonel et sa troupe. J’ai un harmonium et une mandoline.

 

17 juillet 1915.

Relevés par le 73e.

J’ai eu 2 tués et 2 sergents blessés.

Je vais à Trigny (Marne). Le bataillon à Prouilly. Le colonel et le 1er bataillon à Priez. C’est moi qui ai amené le bataillon. »

Page 230 :

« Mouvement de la compagnie le 16 novembre).

I – Le 3e bataillon gagnera demain dans la soirée les abris du Bois-Marteau et du Bois-Clausade où il doit demeurer jusqu’au 19 au soir en réserve du 8e régiment. Itinéraire : Pévy – V. Varennes – Guyencourt – Rouy (Roucy) – Pontavert.

II – La 10e compagnie sera rassemblée à 16 h 45 en colonne par quatre face à l’est, la tête à hauteur de l’église. Ordre de marche : 4e 1re, 2e, 3e sections.

On ne laisse absolument rien dans las baraquements.

III – La soupe sera mangée à 15 h 45.

IV – La cuisine roulante suit le bataillon avec celles des autres compagnies et à leur tête. Tous les cuisiniers marchent dans le rang. Ne marchent avec la cuisine que le sergent Comble et le conducteur.

V – Au rassemblement de départ, le sergent-major distribuera à chaque homme un casse-croûte destiné à être mangé à l’arrivée.

VI – Les chefs de section désigneront chacun 1 homme fatigué pour garder les baraquements. Les 4 hommes désignés pour la compagnie seront pris en substitution par la 5e compagnie et rejoindront la 10e à son cantonnement de Ventelay le 20 novembre.

VII – La marche à exécuter est une marche de nuit. Le capitaine sait que la 10e compagnie s’entend à donner l’exemple d’un silence absolu et d’un ordre rigoureux. »

Pages 233 – 234 :

« CONSIGNES

19 novembre.

La 10e compagnie quitte ce soir ses abris du bois Marteau et va au cantonnement de repos à Ventelay.

Elle est relevée par une compagnie du 86e régiment territorial qui arrive vers 18 heures, puis elle gagne le cantonnement isolément.

En conséquence :

I – A partir de 17 heures, les sacs seront faits et les hommes équipés dans les abris.

Dès l’ordre de rassemblement, la compagnie se rassemblera en colonnes par quatre entre bois Marteau et bois Clausade, et dans la direction de la corne sud-est du bois Clausade.

Ordre de marche : 1re, 2e, 3e, 4e sections.

II – La soupe sera mangée à 16 heures. Un casse-croûte sera distribué aux hommes au moment du rassemblement. Il devra être mangé à l’arrivée au cantonnement. Le sergent Comble prendra les dispositions voulues pour distribuer du café à l’arrivée.

III – Ne marchent avec la cuisine roulante que le sergent Comble et le cuisinier.

IV – Le capitaine sait que sa compagnie marchera parfaitement en ordre.

 

20 novembre.

Le séjour de la compagnie à Ventelay doit être employé par tout le monde pour remettre en bon état l’armement, l’équipement et l’habillement.

Mais avant tout, il est nécessaire que le cantonnement soit parfaitement propre.

En conséquence :

I – Le capitaine passera aujourd’hui à 15 heures la revue du cantonnement : locaux parfaitement en ordre, armes au râtelier, équipement pendus, effets régulièrement disposés.

La symétrie dans la disposition de toute chose est le seul procédé pour se rendre compte rapidement de l’ordre existant et par suite pour l’imposer le cas échéant et l’accroître. Dans chaque local, plusieurs récipients pleins d’eau doivent se trouver en permanence. Enfin, il ne faut pas que pour entrer ou sortir les hommes soient obligés de se livrer à des escalades, par conséquent améliorer les accès et construire des rampes le long des échelles, boucher les trous des planches, etc.

II- Aussitôt après, revue des effets. Les sections seront vues chacune devant son cantonnement. Tenue : veste et calot, capote sur le bras. Les hommes qui ont reçu des effets neufs seront placés à la gauche de chaque section.

III – Ici comme partout, il faut que la 10e compagnie soit un modèle. On y parviendra comme toujours par l’idée précise de ce qu’il faut faire, des ordres nettement donnés, une exécution rapide et de bon cœur, et un contrôle rigoureux des résultats. »

Pages 242 – 243 :

« 28 novembre.

I – La  journée d’aujourd’hui doit être consacrée à préparer la séance récréative donnée demain par la 10e compagnie.

En conséquence :

II -  M. le sous-lieutenant Lejeune est spécialement chargé de faire répéter les chanteurs et danseurs dans la salle. Il établira l’ordre dans lequel ils auront à paraître.

III – M. le sous-lieutenant Averlant est spécialement chargé des dispositions matérielles dans la salle. L’adjudant Hideux lui est adjoint à cet effet. Il aura à s’occuper des sièges pour le plus de monde possible et les fera disposer dès aujourd’hui ; de l’éclairage de la scène et de la salle (lampes et lanternes) ; du chauffage : braseros ou poêles, et combustible à y mettre ; de l’arrangement de la scène, de la façon d’ouvrir et de fermer les fenêtres, etc.

IV – Il faut que tout le monde ait à cœur de faire réussir cette séance. Sa raison d’être est de distraire les hommes et d’accroître par là leur moral. Rien n’est donc plus directement utile au but que tout chef doit se proposer à la guerre.

 

I – Demain matin à 7 h 50 a lieu, sur la place de la Mairie de Ventelay, une parade de dégradation. Les hommes de la 10e compagnie doivent y assister.

II – En conséquence :

Les hommes de la 10e qui ne sont pas de service et qui ne prennent à aucun titre part à la séance récréative seront rassemblés à 7 h 40 par le sergent Danel.

Tenue : capote et calot.

Le sergent Danel les conduira aussitôt place de la Mairie et les formera en ligne sur 2 rangs sur la face est de la place. Ils assisteront à la parade et rentreront aussitôt après.

III – L’adjudant Hideux est désigné pour procéder à la dégradation du condamné. Il ira à 7 h 30 prendre les ordres du Lieutenant Fontaine, commandant la 12e compagnie. »

Pages 245 – 246 :

«  CONSIGNES

30 novembre.

I – Le 3e bataillon quitte ce soir son cantonnement de Roucy et regagne Ventelay où il doit reprendre exactement son ancien cantonnement.

Point initial : la sortie de Roucy vers Ventelay.

Ordre de marche : 12e, 10e, 11e. La tête de la 12e doit passer au point initial à 17 heures.

II – En conséquence :

Rassemblement de la compagnie terminé à 16 h 45 en colonne par quatre sur la route devant le cantonnement de la compagnie.

Ordre de marche : 3e, 4e, 1re, 2e sections.

III  - Comme hier, le sergent Comble seul et 1 cuisinier marchent avec la cuisine roulante. Soupe à 16 heures.

IV – Le fourrier partira d’avance avec un homme. Il se trouvera à 16 heures au logement du commandant.

V – La compagnie doit laisser un cantonnement parfaitement propre. Le capitaine en passera la revue à 15 heures.

Exercice de cadres à 15 h 15 par le capitaine. »

En février 1916, le capitaine de Gaulle quittera ce secteur pour celui de Verdun. Il sera blessé  et fait prisonnier, près de Douaumont, le 2 mars 1916.

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