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30 janvier 2014 4 30 /01 /janvier /2014 14:04

2 010Les comtes de Roucy sont plus connus comme guerriers ou bâtisseurs que comme poètes. Pourtant au XIIIe siècle, Jean, Comte de ROUCY, nous a laissé un poème que l’on peut retrouver dans l’ouvrage de Prosper TARBE, Les Chansonniers de Champagne aux XIIe et XIIIe siècles, publié en 1850 (Imp. De Regnier, Reims. Réédition en fac-similé Elibron Classics).


Prosper TARBE, né à Paris le 24 août 1829 est mort à  Neuilly-sur-Seine le 13 janvier 1871. Fils de notaire, il devient substitut du roi. Son parcours professionnel l’amène à Reims. Homme de lettres, historien, archéologue, cet érudit, membre fondateur de l’Académie Nationale de Reims en 1846, devient spécialiste de l’histoire de Reims et du pays champenois. 

 

Page L : 

« ROUCY, JEAN, Comte de : - Le fief de Roucy-sur-Aisne était l’une des pairies du comté de Champagne. Nous ne ferons pas l’histoire de ses premiers possesseurs ; elle se mêle à celle de Reims. Ils jouirent même quelque temps de la seigneurie de cette ville et portèrent son nom. A la fin du XIIe siècle, Jean de Roucy, 1er du nom, fils d’Elisabeth de Mareuil, mari de Béatrix de Vignory, mourut sans enfants. Sa sœur Eustache lui succédait : elle avait épousé, avant l’an 1200, Robert de Pierrepont, seigneur de Vanneau-le-Chastel. De ce mariage naquit Jean, 2e du nom, comte de Roucy et vicomte de Mareuil. Dès sa jeunesse, il se signala par de vaillants exploits. En 1217, il passa la mer avec Louis de France, fils et successeur de Philippe Auguste. Il l’aida à détrôner Jean sans Terre et à se faire proclamer roi d’Angleterre. Les Anglais, qui avaient appelé Louis, l’abandonnèrent bientôt : ce prince, surnommé Cœur de Lion, soutient dans Londres un siège, qui finit par une capitulation. Il fallut renoncer à cette conquête aussi brillante qu’imprévue. Jean de Roucy revint en France. Plus tard, il prit part aux guerres, qui désolèrent la Flandre de 1247 à 1256. Enrôlé sous les drapeaux du comte d’Anjou, il alla défendre les droits de son compatriote Guy de Dampierre contre les prétentions de Jean d’Avesnes.

2014-01-26 090341

Jean II de Roucy et l'une de ses épouses

On croit qu’il périt dans cette campagne : il se piqua fort peu d’être mari fidèle. En 1225 il avait épousé Isabelle, fille de Robert 2e comte de Dreux. Il la répudia pour s’unir à Jeanne de Dampierre, fille de Guillaume et de Marguerite, comtesse de Flandres. Cette princesse ne put captiver longtemps le cœur de son volage époux : Jean fit briser cette seconde union et donna sa main à Marie de Dommartin. Quand l’âge eut calmé chez lui l’effervescence des passions, il expia les scandales de sa vie par de pieuses libéralités.2014-01-26 111642

L'Abbaye de Valroy

La célèbre maison de la Val Roy fut surtout l’objet de ses largesses. Aussi ses descendants choisirent-ils leur sépulture dans l’église de cette communauté. Il nous reste un seul monument des inspirations poétiques qu’il dut à ses habitudes galantes. Laborde attribue cette chanson à Raoul, IIe du nom, sire de Coucy, tué à la bataille de la Massoure en 1250. Les divers textes, qui nous ont conservé les quatre couplets en litige, les donnent au Quens de Roucy : or les seigneurs de Coucy ne prirent jamais le titre de comte. Le titre de sire de Coucy suffisait à leur amour propre. Celui d’entre eux, qui s’immortalisa comme poète, est connu sous le nom du Chastelain de Coucy. Il est possible qu’un manuscrit donne la chanson, dont il s’agit, à un Quens de Coucy. Mais évidemment il y a erreur du copiste. Et il lui a été plus facile de mettre par mégarde un C au lieu d’un R, que de substituer sans s’en apercevoir le mot de Quens à celui de Chastelain. Notre chanson doit donc rester au pair de Champagne, à Jean de Roucy l’inconstant et le brave, à Jean de Roucy, le descendant de Charlemagne. »

  
 Page 108 :

 Li quens de Rouci

 

     De joli cuer enamouré

Chançonette comencerai

Por savoir s’il venroit en gré

Celi, dont ja ne partirai :

Ains serai à sa volenté.

Ja tant ne m’i ara grevé.

Que ne me truist ami verai.

     Quant son gent cors et son vis cler,

El sa grant valor acointai,

Lors li trovai si à mon gré

Que tote autre amo obliai :

Ce ne fu pas por ma santé.

Ainçois cuid bien tot mon aé

Languir ; que ja ne li dirai.

     Raisons me blasme durement,

Et dist que ne l’ai pas creu,

Quant d’amer si très hautement

Ai trop mauvais conseil eu.

Mais pitiez, qui les vrais amans

Fait estre iriés, liés et joians,

Dist qu’encore m’i sera rendu

     Dame, si j’aim plus hautement

Que mestiers ne me soit eu,

La grant biauté qu’à vous apent

A si mon coraige meu :

Si vous pri merci doucement.

 

Traduction en français moderne :

 

Le comte de Roucy

 

Epris d’un joli cœur

Je commencerai une chansonnette

Pour savoir si elle consentirait à moi

Alors je ne partirai plus :

Il en sera fait selon sa volonté.

Rien ne m’aura autant tourmenté

Que de trouver une véritable amie.

Quand j’ai aperçu son noble corps et son visage lumineux,

Et aussi sa grande valeur,

Alors je les trouvai tellement à mon goût

Que j’oubliai tout autre amour :

Ce ne fut pas bon pour ma santé.

Je crains plutôt de m’affaiblir à mon âge ;

Ce que je ne lui dirai plus.

La raison me blâme durement

Et dit que je ne l’ai pas crue,

Quand j’ai éprouvé si dignement

Un trop mauvais sentiment d’amour.

Mais pitié, celui qui irrite les vrais amoureux,

Heureux et joyeux

Et dit encore que ma Dame me sera rendue

Si j’aime plus dignement

Qu’il n’est nécessaire,

La grande beauté qui vous attache

A tant mû mon courage

Que je vous en rends grâce doucement. 

 

Merci à Aurélie, Nathalie et Béatrice, les championnes de l’Ancien Français !

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