Histoire de Roucy
Au fil du temps on peut trouver notre village sous de nombreuses dénominations : Rocum, Rocus, Roscium, Roscius, Rouciacus, et Roceium (fin VIIe – début VIIIe), Rociacus (840-843), Rauciaco (846), Rauziacus et Rouzicus (851), Castrum-Rocci (949) Rauciacum (954), Rauciacus (968) et Roceio (968 -1079), castro Roceio (1096), castrum Roceium et Rocéius-Castrum (1117), Ruceium (1150), Rusceium (1156), Rosci (1160), Ruci (1163), Ruciacum (1166), Rusciacum (XIIe), Rusci (1200), Rociacum (1202), Roceiium (1211), Roceyo (1224), Rosseium (1251), Rouceyum (1279), Roussi (1280), Roussiaco (avant 1312), Rouci (1320), Roussy (1344), Roucy (1362), Roussiacum (XIVe), Rousy (1615), Roucy (1674)
En revanche, les habitants n’ont jamais eu de nom. S’il fallait leur attribuer un Gentilé, étymologiquement et par analogie ce serait les Roucéens, Roucéennes (Courcy = Courcéens, Courcéennes), voire les Rouciens, Rouciennes (Cormicy = Cormiciens, Cormiciennes ; Corbeny = Corbeniens, Corbeniennes).
Population.
1295 : 24 feux (environ 120 personnes)
1760 : 901 habitants (200 feux), la dépopulation s’est accentuée depuis d’une façon presque constante.
1800 : 704 habitants
1818 : 726 habitants
1836 : 715 habitants
1856 : 714 habitants
1891 : 572 habitants, y compris 45 hospitalisés.
1914 : 465 habitants
1936 : 350 habitants
En 1962, la population de Roucy était descendue à 193 habitants.
Depuis elle s’accroît avec en 1968, 223 habitants
1975 : 249 habitants
1982 : 293 habitants
1990 : 281 habitants
1999 : 329 habitants
167 logements en 2005 dont 80% de résidences principales.
2006 : 399 habitants
Situation géographique
Roucy est situé à 25 km au Nord Ouest de Reims et à 34 km au Sud Est de Laon sur une superficie de 700 hectares dont 150 ha de surfaces boisées.
Le plateau culmine à 206 m (à proximité des ruines du moulin). Le village se situe à une altitude d’environ 100 m, le point bas à 55 m.
L’ancien comté de Roucy était à cheval sur le Laonnois, le Soissonnais et le Rémois, la Picardie et la Champagne. Il relevait du comté de Champagne.
Autrefois de l’intendance de Soissons, des baillages, élection et diocèse de Laon, Roucy dépend aujourd’hui du canton de Neufchâtel, arrondissement de Laon, diocèse de Soissons.
Le patron de Roucy est Saint-Remi
Hydrographie
Le canal.
Le Canal latéral à la rivière Aisne relie le canal des Ardennes et l'Aisne navigable. Long de 52,5 kilomètres, il relie les villes de Vieux-lès-Asfeld (08) et de Celles-sur-Aisne (02) en passant par Berry-au-Bac (02). Il communique avec le canal de l’Aisne à la Marne et avec le canal de l’Oise à l’Aisne. Mis en service en 1841, il a été entièrement reconstruit après la Première Guerre mondiale.
Les ruisseaux.
A part le canal latéral à l’Aisne, l’hydrographie se résume à trois ruisseaux :
- Le ruisseau de Roucy, qui a sa source tout près du sommet du plateau, donne lieu à une cascatelle (petite cascade), arrose quelques rues et le parc de l’ancien château.
- Le ruisseau des Sarrins, venant du bois, du même nom, reçoit le précédent.
- Le ruisseau des Courcelles, arrose Guyencourt, puis Bouffignereux, grossi du ruisseau des Sarrins, il traverse la plaine de l’Est à l’Ouest, sous le nom de ruisseau des Ponceaux, et se jette dans l’Aisne, sur le terroir de Concevreux.
-
Le ruisseau de Roucy et la cascade
L’Aisne.
Le territoire de Roucy appartient en grande partie à la large vallée de l’Aisne, sans atteindre la rivière elle-même qui a toutefois joué un rôle important dans son histoire. Dressé sur une éminence en avant de la ligne de collines qui ferme au sud la vallée de l’Aisne, le château de Roucy surveillait le cours de la rivière et commandait le passage de Pontavert. Roucy était une position militaire avantageuse.
Quelque fois nommée Atax ou Axone dans les anciens titres, et qualifiée du titre de fleuve par les anciens écrivains, la rivière Aisne prend sa source à Sommaisne en forêt d'Argonne dans le département de la Meuse. Elle coule vers le Nord-Ouest, traverse le département de la Marne, baigne Sainte-Menehould, passe dans le département des Ardennes, où elle arrose Vouziers, Rethel, puis se dirige vers l'Ouest, rejoint le département de l'Aisne, de Neufchâtel-sur-Aisne à Vic-sur-Aisne, en arrosant Soissons, entre dans le département de l'Oise et se jette dans l'Oise en amont de Compiègne après avoir parcouru 300 kms. Canalisée sur 56 km, elle est doublée sur 51 km, en amont de Celles, par le canal latéral à l'Aisne. Ses principaux affluents sont l'Aire et la Vesle.
Autrefois, l'Aisne était navigable jusque Neufchâtel-sur-Aisne et Evergnicourt, mais à cause des hauts fonds qui à certaines époques de l’année rendaient sa navigation dangereuse, la plupart des bateaux ne la remontaient pas au-delà de Pontavert qui était le port le plus important du comté. Il transitait surtout des bois de matériaux de construction, du grain, du vin, des ardoises. Elle a été à l'origine du développement de la région.
Un passage d'une charte de l'an 1143 prouve qu'à cette époque les comtes de Roucy entretenaient sur l'Aisne un service de bateaux pour le transport des denrées et peut-être aussi des voyageurs.
En 1790 elle donne son nom à notre département.
Sur la droite, le bateau lavoir de Pontavert.
Nos ancêtres
L’histoire de nos ancêtres commence en Afrique, dans les vallées du Rift, il y a entre cinq et dix millions d’années. Comment sont-ils arrivés à Roucy ? Difficile d’y répondre et là n’est pas notre propos.
Faisons donc un grand bond dans le temps pour retrouver les traces de leurs descendants dans notre région.
Préhistoire.
Il y a presque sept mille ans, tandis que les derniers Mésolithiques vivent, en petits groupes clairsemés, de chasse, de pêche et de cueillette, des colons originaires d’Europe centrale arrivent peu à peu dans la vallée de l’Aisne. Ce sont de petites communautés paysannes d’agriculteurs-éleveurs, qui, partis des bords du Danube en Bohême, déplacent leurs villages régulièrement. En cinq siècles les Danubiens colonisent toute la moitié nord de l’Europe jusqu’au Bassin parisien. La première partie de la « civilisation danubienne est appelée le « Rubané ». Vers 5000 avant notre ère, les Rubanés s’installent dans la vallée de l’Aisne et notamment près de Roucy.
Un site néolithique d’une trentaine de maisons, à Cuiry-lès-Chaudardes au bord de l’Aisne, a été découvert en 1972. C’est l’un des premiers villages du Nord de la France. Il s’est renouvelé pendant deux siècles vers 4800 avant J.-C. par l’abandon des anciennes maisons et la construction de nouvelles, un peu plus loin. Les archéologues ont reconnu les affinités danubiennes de ces premiers villageois. Les terres sablonneuses de la vallée ont attiré les premiers paysans alors que les plateaux voisins couverts de forêts semblent avoir été des terrains de chasse. L’épuisement des terres cultivées, défrichées par brûlis, obligeant les nouvelles générations à déplacer le village à proximité de nouvelles terres.
Depuis, la vallée de l’Aisne a connu une occupation constante. De nombreux vestiges furent découverts dans les environs de Roucy, beaucoup restent sans doute à découvrir.
Les fouilles précédant la construction de l’école des Ponceaux à Roucy, ont montré l’existence de deux types de vestiges archéologiques, d’une part des fossés d’époque indéterminée, d’autre part des fosses et une sépulture à inhumation datées de l’âge du Fer (probablement de La Tène ancienne). Cette dernière renfermait les restes d’un squelette humain. Deux tessons de facture protohistorique ont été découverts au nord de la fosse.
Les Gaulois.
Vers 600 ans avant notre ère, les Celtes constituent une partie importante de la population de la vallée de l’Aisne.
Lorsque l’expansion celtique s’achève, à la fin du 3e siècle avant notre ère, l’Aisne appartient à la Gaule Belgique, située entre les cours de la Seine et de la Marne, au Sud, et celui du Rhin au Nord et à l’Est.
Lors de l’invasion par Jules César, en 57 avant notre ère, notre région est peuplée par les Gaulois, d’origine celte, mais la vallée de l’Aisne traverse deux territoires politiquement autonomes qualifiés de civitates (cités). La première, peuplée par les Suessions, s’étend, d’Ouest en Est de Compiègne à Bourg-et-Comin et, du Nord au Sud sur les plateaux du Soissonnais. La seconde cité, peuplée par les Rèmes, occupe l’actuel territoire administratif de la Champagne-Ardenne et le Laonnois, à l’Ouest d’une ligne Bourg-et-Comin – Fismes – Dormans.
Jules César, dans ses Commentaires sur la Guerre des Gaules, dit des Rèmes « Gallorum omnium fortissimi Belgii », et Strabon ajoute « Inter istas gentes Remi sunt nobilissimi », ce qu’on peut traduire par « De tous les Gaulois, les Belges sont les plus braves, et parmi eux les Rèmes sont les plus illustres ».
D’après les auteurs latins, la Picardie actuelle était alors considérée comme l’une des plus riches régions de l’Occident avec des voies de communication nombreuses.
Veni, vidi Roucy ou Jules César est-il passé à Roucy ?
En -57, Jules César ayant appris que les Belges et divers peuples rassemblaient une armée à laquelle s’étaient joints les Suessions mais pas les Rèmes, se décida à entrer en campagne. Son armée se composait d’au moins 60 000 soldats. Il établit son camp sur la colline située entre l’Aisne et la Miette, près de l’endroit ou se trouve aujourd’hui Berry-au-Bac. Les Belges après avoir échoué à s’emparer de l’oppidum de Bibrax (situé à Vieux-Laon sur la commune de Saint-Thomas) essayèrent notamment de franchir l’Aisne entre Pontavert et Gernicourt pour intercepter les convois de vivres et ravager le pays des Rèmes. Les opérations menées par les Belges ayant échoué, ils prirent le parti de retourner chez eux mais furent poursuivis par l’armée romaine qui en tua « autant que le permit la durée du jour ».
Le lendemain, César leva son camp, traversa l’Aisne, descendit la rive gauche et arriva après une journée de marche devant Noviodunum (Soissons).
Selon S.Prioux, une voie antique reliait directement Roucy à Soissons. Elle fut sans doute empruntée par Jules César.
Clovis.
Clovis et Saint-Remi (cathédrale de Reims)
Cinq siècles après César, Clovis, persuade le peuple des Suessonnais soumis au joug romain, de s’insurger contre Syagrius, patrice et gouverneur de leur cité, et s’allie avec eux pour la bataille. Les Romains sont battus près de la rivière l’Ailette et Syagrius tué. Clovis se retourne alors contre son allié, conquiert le pays, s’y installe, se proclame roi et fait de Soissons la capitale de ce nouveau royaume : la France, qu’il vient de créer (486).
Clovis vainqueur de Syagrius (dans l'imagerie populaire)
A la mort de Clovis (511) ses fils se partagèrent les conquêtes de leur père. L’un d’entre eux reçut l’Austrasie, ou Royaume de l’Est, capitale : Reims d’abord, Metz ensuite. L’autre la Neustrie, ou Royaume de l’Ouest, capitale : Soissons, Paris ensuite. Dans le Laonnois, ces deux royaumes se confondaient suivant une ligne de direction générale Nord-Sud, qui mettait Laon et Cormicy en Austrasie, tandis que Fismes était en Neustrie. Cette ligne traversait l’Aisne et le territoire du futur comté de Roucy. Frontière imprécise et mouvante au gré des terribles rivalités de prédominances d’autorité et de successions tranchées par le glaive. A la fin de l’ère mérovingienne (752) la Neustrie n’était plus qu’un royaume vassal de l’Austrasie, réduite aux régions Nord-Ouest de la France.
Saint-Gibrien
Roucy est assurément l’un des plus anciens bourgs du pays, car il en est fait mention dès le VIe siècle dans la relation des miracles de Saint-Gibrien, écrite par un auteur contemporain. Il eut sans doute au Moyen-Âge une importance assez considérable, à en juger par l’épithète de Castrum que lui donnent tous les actes des XIe et XIIe siècles
Charles le Chauve
Dès les temps les plus reculés, la terre de Roucy, appartenait au fisc royal.
Une villa royale s’y trouvait, dans laquelle Charles-le-Chauve, tint un parlement en 851. Elle devait se trouver en un lieu élevé afin de surveiller les deux vallées de l’Aisne et de la Vesle. Or, il y a à l’Est du village une petite éminence nommée la Comète qui pourrait être l’emplacement de la villa royale (déformation du mot bas-latin comès (comte), haut fonctionnaire impérial sous le Bas-Empire romain et représentant du roi au Moyen-Âge).
Ragenold et la création du comté de Roucy
Vers la fin du VIIIe siècle commencèrent les grandes invasions normandes qui ravagèrent tout le pays alors français.
L'arrivée des Normands
Charles-le-Simple (891-923) mit fin au désordre et à l’anarchie sociale de ces invasions ruineuses en cédant aux Normands le pays de la Basse Seine, appelé depuis la Normandie.
Ragenold, qui devint le chef et fondateur de la première maison comtale de Roucy, était un de ces hommes d’origine du Nord. Son nom apparaît dans l’histoire pour la première fois en 923. Il guerroie alors dans le blésois, au service de « qui l’appelle ou contre qui le tente ».
En 924, Raoul, duc de France et maire du palais royal, fait une nouvelle paix avec les Normands et étend leurs possessions en Normandie ; mais Ragenold était absent et ne reçut rien. Il continua ses ravages en Champagne et jusqu’en Bourgogne.
On ignore pour quelle raison, mais Ragenold s’allie au roi Louis IV d’Outre-Mer pour mettre le siège devant Reims (vers 936). Peut-être est-ce à cette occasion que le roi, réalisant l’ardent désir de son allié, donna à Ragenold la terre de Roucy pour qu’il y construise une forteresse d’où il pourrait surveiller la route de Laon à Reims et les passages de la rivière. Ce premier château fort était une construction élevée hâtivement et provisoire, formée d’une tour en bois édifiée en quelques mois, entourée d’un large et profond fossé et d’une palissade également en bois (la motte féodale). La construction en pierre ne fut probablement entreprise qu’au cours du XIe siècle.
Ragenold contracta mariage avec Albrade (entre 944 et 947), qui veuve depuis 939, avait épousé en secondes noces le roi Louis IV d’Outre-Mer. Cette union faisait de Ragenold le gendre du roi de France et le neveu d’Hugues-le-Grand, père d’Hugues Capet. Ce mariage valut, en outre, à Ragenold, son titre de Comès Ludovici, titre encore attaché à la personne du roi, non à une terre.
Hugues le Grand, en conflit avec le roi assiégea Soissons (948) dont il ne put s’emparer. Par vengeance, il se retourna contre Ragenold et alla l’assiéger dans son château de Roucy nouvellement construit. Ce fut un nouvel échec. De colère, Hugues dévasta toute la campagne environnante. Flodoart, alors curé de Cormicy, nous dit que sur sa seule paroisse quatre cents personnes périrent. Depuis ce temps, Ragenold est bien comte de Roucy (948). Il possède la terre en fief et en prend le nom. Ce lieu devint dès lors le chef-lieu d’un comté dont relevaient un assez grand nombre de seigneuries voisines, et son propriétaire prit rang parmi les sept pairs du comté de Champagne
En 954, Herbert de Vermandois assiégea le château de Roucy et le prit par surprise en l’absence de Ragenold qui était près de la dépouille du roi Louis d’Outre-Mer qui venait de mourir des suites d’un accident de chasse survenu entre Laon et Berry-au-Bac. Ragenold ralliant ses partisans à Mareuil-sur-Ay s’empara de la forteresse du Montfélix (Chavot) qui appartenait à Herbert et qu’il lui échangea contre son château de Roucy.
Il fut tué le 10 mars 973, en une bataille devant Péronne, et inhumé en l’abbaye de Saint-Remi à Reims.
En 989, une entrevue eut lieu au château de Roucy entre Gerbert, le futur pape Sylvestre II, et les fils de Ragenold, Brunon, évêque de Langres et Gislebert nouveau comte de Roucy.
Le prieuré
Une passerelle reliait directement le château au prieuré en enjambant la rue du Pavé.
Le pignon de la chapelle, du XIIIè siècle, avec une rosace de style roman, est classé à l’inventaire des Monuments Historiques du 3 juin 1932.
Le pignon du prieuré de Roucy
Saint Bruno
Saint Bruno (église Saint Bruno à Voiron)
Ebles II de Roucy – Ramerup, comte de Roucy reçu de 1077 à 1080 dans son château de Roucy, Saint Bruno, chanoine et écolâtre de Reims, futur fondateur de l’ordre des Chartreux, qui persécuté par Manassès de Gournay, archevêque de Reims, avait du s’enfuir avec plusieurs de ses disciples dont Manassès de Ramerup neveu d’Ebles et peut être aussi Eudes de Chatillon le futur pape Urbain II.
Pierre L'Hermite et le pape Urbain II.
La léproserie.
Les anciens seigneurs de Roucy avaient fondé une léproserie dès le XIIème siècle dont les biens furent réunis en 1476 à l’hôpital qui le remplaça et qui appartenait à la même abbaye (la maladrerie est mentionnée dans le Pouillé du XVème siècle du diocèse de Laon). Cet hôpital fut réuni à l’Hôtel-Dieu de Laon en 1699.
La guerre de Cent Ans (1337-1453).
En 1358, les Anglais s’emparèrent du château de Roucy, grâce à la traîtrise d’un chambellan. Robert II de Roucy – Pierrepont, comte de Roucy, sa femme et sa fille, furent libérés contre une rançon mais durent se réfugier à Laon, les Anglais conservant le château de Roucy.
Jean de Craon, archevêque de Reims, parent du comte de Roucy, recruta une armée, et le château fut repris après un siège de vingt-huit jours. Le chambellan félon fut livré à Laon où il fut écorché vif.
Jeanne d’Arc et Charles VII
Jeanne d’Arc, qui avait recruté Robert de Sarrebruck, comte de Roucy, et sa petite armée depuis Châlons, fit couronner Charles VII à Reims le 17 juillet 1429.
Les notables de Reims à la rencontre de Charles VII
Les fêtes passées, le roi, suivi par Jeanne quitta Reims pour Corbeny. Afin d’éviter la garnison anglaise de Berry-au-Bac qui contrôlait l’ancienne voie romaine de Reims à Laon, le cortège royal se dirigea vers l’abbaye de Saint Thierry pour y faire ses dévotions, et de là par Hermonville à Cormicy où la cour séjourna le 21 juillet avant d’aller se restaurer au château de Roucy le 22. Le comte de Roucy devait probablement escorter le roi ou l’avait devancé pour hâter les préparatifs de la réception et pour accueillir son hôte à son arrivée. Quoi qu’il en fut, après le repas, le cortège se remit en route, par Pontavert, vers l’abbaye de Saint Marcoul pour, le lendemain, selon la tradition, y toucher les malades atteints d’écrouelle. La cour s’est ensuite rendue de Corbeny à Vailly.
Jeanne d'Arc et Charles VII
Les débuts du protestantisme
Charles de Roye, comte de Roucy de 1526 à 1552, avait épousé Madeleine de Mailly fille du maréchal Ferry de Mailly et de Louise de Montmorency qui, veuve se remaria à Gaspard de Coligny. Madeleine de Mailly était donc la nièce du maréchal Anne de Montmorency et la demi-sœur des trois frères de Coligny.
Madeleine de Mailly
C’est par elle que le calvinisme entra dans la maison de Roucy. Elle, et toute sa famille, furent parmi les plus fermes appuis de la religion réformée dans toute la région laonnoise. Des historiens prétendent que pendant ce temps, à deux pas, les Guise élaboraient les grandes lignes de la Ligue catholique dans leur château de Marchais, à l’ombre de Notre-Dame de Liesse.
Château de Marchais.
Vers 1650 un prêche protestant, le plus important de la contrée, existait à Roucy et, de là, des prédicants répandaient les nouvelles doctrines dans les paroisses environnantes.
Le château Renaissance
La motte féodale vue du ciel en 1991
Le premier château, la motte féodale, remonte au IXème siècle. Un château féodal lui succéda au XIe – XIIe siècle. Il fut entièrement reconstruit par François de La Rochefoucauld au XVIème siècle dans un style Renaissance. Des travaux considérables furent exécutés : le cours du ruisseau fut modifié, les eaux empruntant pour franchir la propriété un canal souterrain qui existe encore.
François de La Rochefoucauld fut assassiné à Paris, lors de la Saint-Barthélemy, le 24 août 1572.
Le château sera fortement remanié, à partir de 1785, par Armand-Joseph Béthune, duc de Charost. Il sera partiellement démoli et reconstruit sur un nouveau plan et la distribution intérieure recevra une distribution plus moderne, inspirée du style Louis XVI. La Révolution de 1789 interrompit ces travaux qui ne furent terminés qu’en 1870 par Charles-Louis-Xavier de Vassinhac, comte d’Imécourt, avec le concours de l’architecte Boeswilwald.
On peut encore voir dans le parc du château la glacière, en parfait état de conservation.
La glacière
La justice.
La justice était exercée à Roucy par un bailli, un lieutenant, plusieurs assesseurs, un procureur général fiscal, un substitut du procureur et un greffier, dans une salle dépendant des communs du château, la rue qui y conduisait s’appelait rue de l’Auditoire. En 1532, le bailli transféra son siège à Berry-au-Bac, en raison de la peste.
La basse justice était abandonnée à un prévôt, assisté d’un lieutenant, d’un procureur et d’échevins.
Trois gouverneurs administraient le village ; ils nommaient les égards (gardes) et les gardes des champs qui étaient au nombre de quinze en 1543.
Jusqu’en 1790 les fourches patibulaires (le gibet) se dressaient sur la montagne de Roucy à 78 mètres du moulin à vent, au lieudit la Justice.
La fustigation (fouet), l’exposition publique et la marque au feu des condamnés aux galères avaient pour théâtre la place du marché, devant l’église paroissiale. C’est ainsi qu’en 1774, sur la place de l’église à Roucy, furent torturés et roués vifs deux criminels convaincus d’avoir assassiné un cabaretier et sa femme à Villes devant le Thour.
Louis XIII
On attribuait aux rois de France le pouvoir de guérir les écrouelles. A l’issue de leur sacre à Reims, ils se rendaient au prieuré Saint Marcoul de Corbeny pour y guérir les malades atteints du mal scrofuleux. A cette occasion certains de nos rois sont sans doute passés par notre village. Comme on l’a vu précédemment, Charles VII est passé à Roucy accompagné de Jeanne d’Arc, le 22 juillet 1429. Louis XIII, après son couronnement à Reims le 17 octobre 1610 quitta Reims le mercredi 20 et alla dîner à Roucy, puis coucher à Corbeny. Il venait d’avoir 9 ans.
Louis XIII enfant
La Fronde (1648-1653)
La Fronde est une période de troubles graves pendant la minorité de Louis XIV. De nombreux villages sont incendiés et pillés.
A cette époque Roucy est toujours un fief calviniste. Tant bien que mal, le comté de Roucy est préservé des combats meurtriers, il n’en connaît pas moins les fléaux que la guerre traîne avec elle : une misère effroyable frappant également la masure et le château, le rural et le citadin.
De plus, les rudes hivers de 1657 et 1658 provoquèrent d’importants débordements de l’Aisne, de la Marne, de la Vesle et de la Suippe.
La fin du protestantisme
Du 17 septembre au 14 octobre 1663 s’est tenu au château de Roucy un synode des ministres de la Religion réformée (R.P.R.) de l’Ile de France.
Après la Révocation de l’Edit de Nantes, le 18 octobre 1685, beaucoup de protestants de toutes les classes sociales quittèrent leur pays et leurs biens pour se réfugier à l’étranger. A Roucy et dans les villages environnants cet exode fut important. Parmi les calvinistes un petit nombre seulement abjurèrent leur foi, plus ou moins sincèrement.
En 1687, César d’Estrée, évêque de Laon, ordonnait que des missions apostoliques soient prêchées à Roucy et à Pontavert pour effacer dans cette région toute trace d’hérésie ; mais il se produisit des incidents qui provoquèrent l’intervention du roi lui-même.
Frédérick – Charles de Roye de La Rochefoucauld, comte de Roucy de 1680 à 1690, avait obtenu du roi Louis XIV la permission de quitter la France pour se mettre au service du roi de Danemark qui lui donna le titre de Grand’Maître de ses armées en 1683. Il passa ensuite à Hambourg puis à Londres où Jacques II, roi d’Angleterre le fit pair d’Irlande. Frédérick-Charles de Roye et sa famille ne furent pas considérés comme fugitifs.
Son fils François II de Roye, comte de Roucy de 1690 à 1721, avait abjuré le protestantisme devant Bossuet en 1684.
Béthune Charost
Armand – Joseph de Béthune Charost, comte de Roucy de 1739 à 1800, se montra un philanthrope avisé, établissant des ateliers de charité, traçant des routes, travaillant à l’amélioration des moyens et des méthodes de l’agriculture. Il contribua à l’amélioration des races de moutons, de vaches et de chevaux. Il ouvrit des écoles pour l’instruction des enfants à Roucy et à Meillant et y établit des médecins et des sages-femmes.
Les écoles.
Leur histoire remonte assez haut dans la commune de Roucy. En effet, dès 1688, les religieuses des écoles chrétiennes de Laon, appelées sœurs Marquette, établirent dans le pays sous la conduite de la sœur Louise d’Anicourt, une école pour les jeunes filles. On n’a malheureusement aucun renseignement sur cet établissement ni sur ceux qui lui ont succédé.
Le 13 novembre 1827, la comtesse de Henriette-Adélaïde-Joséphine de Bouchet de Sourches, deuxième femme d’Armand-Joseph de Béthune donnait à la commune de Roucy deux maisons mitoyennes, sises sur la place de l’église, et une rente perpétuelle de 600 francs annuellement, à la communauté religieuse des « Sœurs de Notre Dame du Bon Secours » de Charly pour y fonder à Roucy une école de filles. Cette institution recevait des élèves pensionnaires. Elle existait encore au début du XXè siècle.
En 1838 était fondé à Roucy une école pour les garçons, qui était peut-être un don post-mortem de la même comtesse.
L'école des garçons avant la guerre 1914-1918.
Détruite pendant la guerre 14-18, l’école fut transférée, ainsi que la mairie, dans l’ancien hospice jusqu’à leur reconstruction en 1923.
Depuis janvier 2000, l’école « Les Ponceaux » accueille les enfants de Bouffignereux, Guyencourt et Roucy en maternelle et primaire.
La Révolution (1789-1799)
Roucy fut, en 1790, le chef-lieu d’un canton dépendant du district de Laon et formé des communes de Roucy, Berry-au-Bac, Bouffignereux, Chaudardes, Concevreux, Gernicourt, Guyencourt, Maizy, Meurival, Muscourt, Pontavert et la Ville-aux-Bois-les-Pontavert. Mais en 1819, l’administration centrale diminua le nombre des cantons dans toute la France et Roucy ne fut plus que l’une des vingt-huit communes du canton de Neuchâtel.
Jean-Baptiste Richon était curé de Roucy depuis 1756. Il prêta serment à la constitution civile du clergé, mais se rétracta peu après. Son vicaire, Dollé, prêta aussi le serment, mais se rétracta deux ans plus tard, en 1793.
Une enquête, faite en 1800, sur l’état des esprits dans les paroisses du doyenné de Neufchâtel, concluait, à peu près partout, pour chacune des paroisses « quelques paroissiens fidèles, mais faibles et peu fervents. »
En 1789, l’assemblée constituante décida la mise en vente des biens ecclésiastiques et accorda aux municipalités, en 1790, un droit d’achat avant les ventes publiques, et à des conditions favorables. La commune de Roucy se rendit acquéreur de tous les lots sis sur son territoire au prix d’estimation, pour les revendre. Ces ventes furent consenties à Laon et les enchères publiques commencèrent le 6 janvier 1791. Les acquisitions étaient payables en assignats d’une valeur fiduciaire déjà dépréciée. En 1793, Fillion, cultivateur à Roucy, était propriétaire du prieuré, avec toutes ses dépendances. Et en 1797, Louis Robert, cultivateur à Vauclair était acquéreur du presbytère paroissial avec toutes ses dépendances.
Les moulins.
En 1809, 371 moulins à vent ont été recensés dans l'Aisne. Il y avait 3 moulins à Roucy, un à vent et deux à eau.
L’abbé Bigot énumère les trois moulins de Roucy : le moulin à vent sur la montagne, le moulin Arson, détruit par la foudre, et celui de la Ville ou Templière.
Le moulin à vent de Roucy avant la guerre 14-18
Napoléon, de la victoire de Craonne (6 et 7 mars 1814) à la défaite de Laon (9 – 10 et 11 mars 1814)
Napoléon par Girodet de Roucy-Trioson
En 1814, la France est envahie. La Champagne souffre cruellement de cette invasion, après tant d’autres qui l’avaient précédée.
Après une retraite pénible des armées françaises, les victoires de Champaubert, de Montmirail, de Château-Thierry, de Vauchamps, remportées contre les alliés coalisés relèvent le courage de l’armée, rendent l’espoir à la nation.
Cependant, les russo-prussiens reconstituent une armée qui menace, par le Nord, la vallée de l’Aisne. Soissons est alors un point stratégique important. Les Russes, qui avaient emporté cette place le 14 février, avaient dû l’abandonner le 19. Mais le 2 mars, ils se présentaient de nouveau autour de la ville, venant par la route de Reims, tandis que des prussiens arrivaient par celle de Laon. Le général Moreau en fit la reddition afin d’épargner aux habitants les horreurs de l’incendie et du pillage.
Occupation par les Cosaques en 1814.
Pendant ce temps, Napoléon arrivait à Fismes le soir du 4 mars.
Le 5 mars, l’avant-garde française quitta Fismes, elle rencontra un régiment de lanciers russes. Vigoureusement chargés par les lanciers polonais, les Russes furent poussés sur la pente de Merval qu’ils descendirent en désordre pour se retirer vers Roucy et Berry-au-Bac.
Les Polonais et la compagnie de vieille garde gravirent la montagne de Maizy pour aller rejoindre l’Empereur et l’armée défila par les hauteurs qui dominent Maizy, Concevreux et Roucy, vers Berry-au-Bac où un pont en pierre promettait un passage commode.
En arrivant à Roucy, on fit cependant un essai infructueux pour jeter un pont sur l’Aisne.
Auparavant, les deux escadrons aux ordres du général Guyot qui poussaient une reconnaissance sur la hauteur de Roucy firent la rencontre d’un assez fort détachement ennemi qui escortait un convoi de bagages, l’attaquèrent auprès de Concevreux, et, aidés des habitants de Concevreux, de Roucy, et probablement de Bouffignereux et de Gernicourt, lui enlevèrent une partie des voitures qu’il conduisait sur Reims. C’est sans doute ce jour-là que s’accomplit un trait de bravoure. Plusieurs cavaliers prussiens, emmenant des voitures et quelques bêtes à cornes, avaient envahi une ferme de Roucy. Un grenadier de la garde, nommé Viéville, de Guise, pénètre dans la cour et s’élance seul sur les cavaliers qui, le pensant sans doute bien soutenu, s’enfuient en abandonnant bagages et bestiaux.
Les reconnaissances envoyées par l’ennemi vers Roucy, se retirèrent en combattant jusqu’à la ferme isolée de Moscou, bâtie depuis un an sur la route impériale de Laon à Reims…
Dans plusieurs courriers de l’Empereur au maréchal Berthier, Roucy est mentionné, ainsi le 5 mars : « …un détachement de 50 dragons de la Garde a passé la nuit à Roucy, le général Pacz lui enverra l’ordre de se porter de suite à Berry-au-Bac pour garder le pont.. »
Berthier
L’abbé Bigot décrit le passage de Napoléon 1er marchant sur Berry-au-Bac : « Toute l’armée défila le dit jour, 5 mars sur Ventelay, Concevreux et Roucy pour aller passer l’Aisne à Bac à Berry le 6. L’empereur déjeuna en passant à la ferme du Faîté d’où ses yeux d’aigle lui faisaient entrevoir les Russes dans le voisinage. En échange de quelques œufs, il donna plusieurs pièces d’or, remonta à cheval pour se diriger vers Berry-au-Bac, bivouaqua dans les environs de Craonne dans la nuit du 6 mars. Le jour suivant eut lieu la bataille de Craonne. »
Le 6 mars 1814, Marmont, duc de Raguse vint à Roucy avec ses troupes.
Bataille de Craonne gagnée par Napoléon le 7 mars 1814.
Le 7 mars, au matin Napoléon écrit de Corbeny à Berthier : « Donnez ordre au duc de Padoue, aussitôt qu’il aura fait ses vivres à Roucy, de se rendre à Berry-au-Bac… ».
A midi, Berthier recevait de Marmont l’avis suivant : « J’arrive au Bac à Berry avec mon infanterie, j’ai reçu seulement à Roucy l’ordre d’éclairer Braine et de garder Fismes… je n’ai pas pu jeter de pont sur l’Aisne…j’ai laissé le duc de Padoue à Roucy, il se mettra en marche aussitôt qu’il aura rassemblé ses vivres… »
Le même jour, dans l’après-midi, le colonel Planzeaux du 8ème chasseur, en vigie au moulin de Roucy, écrivait à l’état-major : « J’ai vu derrière le village de Pontavert sept à huit cents cavaliers ; ils viennent de partir vers Beaurieux ».
Marmont, duc de Raguse
Le 8 mars, le duc de Raguse après avoir rallié la division du duc de Padoue, se porta le soir, de Roucy sur Corbeny. Mais il est battu à Laon (9-10 mars 1814), ce qui lui vaut des reproches de l’Empereur.
Se sentant menacé de trois côtés à la fois, sur la route de Reims où les Russes et le comte de Saint-Priest arrivaient par la Champagne, sur la route de Laon déjà envahie, et sur son flanc droit, si Vailly tombait, comme il était facile de la prévoir, le duc de Raguse décida de quitter Berry-au-Bac pour marcher sur Roucy où il arriva dans la matinée du 11 mars. En prenant position à Roucy, il y trouvait à la fois l’avantage de se rapprocher de Soissons et de l’Empereur, de mieux éclairer tout le cours de la rivière, de protéger le gué de Pontavert et surtout de surveiller Vailly. Marmont venait de s’établir dans Roucy, lorsque arriva un aide-de-camp du ministre de la guerre apportant un ordre précis au maréchal de prendre position à Berry-au-Bac et d’y rester.
Bataille de Laon. Napoléon par Meissonnier (détail)
Le 11 mars, Marmont, au moment où il va de nouveau partir de Roucy pour retourner à Berry-au-Bac écrit au ministre de la guerre. Il lui explique les raisons de son mouvement sur Roucy, les dangers qu’il court à Berry-au-Bac.
Entrée de Blücher à Laon (gravure prussienne)
Marmont ne quitta cependant point Roucy. Le 11 mars au soir, ses espions lui apprirent que le plateau de Craonne était complètement occupé par l’ennemi et paraissait se décider à marcher à la fois sur Vailly et sur Berry-au-Bac. Ainsi placé entre deux nécessités, celle de désobéir à un ordre ministériel et celle de ne point se laisser séparer de l’Empereur, le duc de Raguse se décida à rétrograder sur Fismes.
Entrée de Napoléon à Reims, mars 1814
Lors de leur entrevue le 14 mars 1814 à Reims, l’Empereur donne l’ordre au duc de Raguse de retourner vers l’Aisne pour la garder. Quelques troupes alliées avaient déjà franchi la rivière à Pontavert et s’étaient portées sur Roucy que l’ennemi occupait ainsi que Bouffignereux par quatre cents cavaliers. A la hauteur de Cormicy, Marmont rencontra une division alliée forte de deux mille hommes d’infanterie et de deux cents cavaliers. Il fit charger cette avant-garde par sa cavalerie, la poussa jusqu’à la rivière et la força à passer précipitamment le pont et à rétrograder vers la falaise de l’Aisne. Il put alors occuper le village en force et assurer de même la sécurité de Roucy qu’on débarrassa des cavaliers qui s’en étaient emparés, en passant au gué de La Pêcherie.
Le 18 mars 1814 au matin, le duc de Raguse, voyant les colonnes ennemies s’approcher de l’Aisne, chargea le général Ricard, avec sa division et celle du général Merlin, de la défense de Berry-au-Bac, et lui-même se porta à Pontavert avec une brigade et une batterie ; le restant de son infanterie et les cuirassiers du général Bordesoulle furent placés en réserve sur les hauteurs de Roucy. Vers le soir, la cavalerie du général Czerniszeff commençant à passer la Suippe, la division Ricard et puis les troupes qui étaient à Pontavert furent forcées de se replier : elles se réunirent à Roucy, où le duc de Raguse prit un moment position avant de se retirer sur Fismes laissant la place à l’armée prussienne.
Le 19 mars 1814 le corps d’Yorck, de l’armée prussienne, occupait Romain et Ventelay, celui de Sacken Pontavert. Le maréchal Blücher ordonna aux généraux Kleist et Yorck de poursuivre l’armée française par Cormicy et Roucy sur la Vesle…
Blucher
Dans ses Mémoires le Maréchal Marmont écrira : « J’évacuai Béry-au-Bacq. …/… Je fis ma retraite doucement, en bon ordre, sur Roucy, et de là sur la Vesle, à Fismes, où je m’arrêtai. Ce mouvement, exécuté par ma cavalerie dans la plaine entre Roucy et Fismes, fut remarquable par sa lenteur et l’ordre qui y régna. »
Le comte d’Imécourt
Charles-Louis-Xavier de Wassinhac, comte d’Imécourt, hérita du château et du domaine de Roucy en 1843. Il fut maire de Roucy et conseiller général du département de l’Aisne.
Lui et sa femme aimaient à résider à Roucy. Il répara avec goût et diligence les dégâts que les russes avaient faits à son château en 1814.
L’hospice
Le comte d’Imécourt consacra la dot de sa fille Margueritte, décédée dans sa 9ème année, à la construction de l’hospice de Roucy. Edifié vers 1861, il brûla en 1894 (6 victimes) et fut reconstruit 3 ans plus tard. Cet établissement fut confié aux dames religieuses de Saint Charles de Nancy. Elles y recevaient des vieillards sans grandes infirmités et des orphelines auxquelles on apprenait le jardinage et la couture. Dans la crypte, sous la chapelle, reposait la famille d’Imécourt.
L'hospice avant la guerre 14-18.
Cet établissement hospitalier n’est pas le premier qui ait existé en cet endroit. Les anciens seigneurs de Roucy avaient fondé une maladrerie qui en 1699 fut réunie à l’Hôtel-Dieu de Laon.
Successivement asile, ouvroir, dispensaire, hôpital, maison de repos, mairie et école (après la guerre 14-18), colonie de vacances des PTT … et guinguette, l’ancien hospice est maintenant la propriété de l’Association évangélique « Plus que Vainqueurs » sous l’appellation « Le Bon Samaritain de Roucy ».
Les pressoirs. Les pressoirs banaux existaient et servaient encore vers les années 1900. C’étaient quatre appareils charronnés à presse carrée et grande roue à échelle de perroquet, logés dans un bâtiment de plan carré, et situé entre la rue et le chevet de l’église.
En 1650, la production annuelle de vin pour Roucy était de 10 000 pièces de 205 litres (y compris le vignoble de la châtellenie qui devait presser leur marc au pressoir banal du château).
Ce vin rosé, léger, agréable à boire pendant la saison chaude, rivalisait avec les deuxièmes qualités des vins de Champagne.
Mais sur l’autre versant de la vallée de l’Aisne, au territoire de Craonne, un autre vignoble mieux exposé surclassait celui de Roucy, autant par la quantité que par la qualité de sa production.
Le CBR.
Le Chemin de fer de la banlieue de Reims était le poumon économique de la région avant 1914. Roucy était situé sur la ligne de Reims à Soissons. La gare de Roucy était le point de raccordement entre la ligne de Soissons à Rethel et l'embranchement de Roucy à Corbeny, de 10,5 km, ouvert au public le 1er janvier 1905, desservant les gares de Pontavert et de Craonne. Il fallait compter 32 minutes pour aller de Roucy à Corbeny.
La gare de Roucy.
Grâce à cet embranchement, les habitants de la partie Est du Chemin des Dames pouvaient facilement se rendre à Soissons, Rethel, Reims, Epernay ou Châlons-sur-Marne.
La première Guerre mondiale (1914-1918).
Roucy est resté français pendant tout le conflit, sauf quelques jours en septembre 1914 et quelques semaines à l’été 1918. Roucy a cependant beaucoup souffert de la proximité du front et des bombardements allemands de 1917 puis de la contre-offensive alliée à la fin de la guerre. Le village et ses creutes furent une base de repos, mais aussi d’observation et de départ vers le front du Bois des Buttes.
Le Bureau des Postes et télégraphes pendant la guerre.
Roucy siège de plusieurs états-majors
Le village fut le siège de plusieurs états-majors, notamment de la 5e Division d’Infanterie du général Mangin, au prieuré (voir par ailleurs la présentation du livre d’Henry Dutheil « De Sauret la Honte à Mangin le Boucher »), du général Guignabaudet qui commandait la 2ème Division d'Infanterie en août 1915, et en mai 1918 de la 8th Infanterie Division Britannique du Major général Henecker, certainement dans le château.
Affectée au 5e Corps d’Armée, l’escadrille d’aviation SPAbi 2 était basée à Roucy lors de l’armistice.
de Gaulle à Roucy.
Le 18 octobre 1914, le lieutenant de Gaulle arrive à Ventelay, quartier général du 1er Corps de la 5e Armée. Le soir il part pour Chaudardes où est la 2e Division d’Infanterie. Dans ses « Lettres, notes et carnets », il mentionne plusieurs fois Roucy (13 juin 1915, 15 novembre 1915, 30 novembre 1915, 4 décembre 1915). Il est alors capitaine depuis janvier 1915 et commande la 10e compagnie du 33e régiment d’Infanterie. En février 1916, le 1er Corps d’Armée est envoyé à Verdun.
Apollinaire a-t-il eu le temps de connaître Roucy ?
Bien qu’âgé de 34 ans, Apollinaire tente de s‘engager dès la déclaration de la guerre en août 1914. Dans un premier temps le conseil de révision ajourne sa demande car il n’est pas français. Sa deuxième demande d’octobre 1914 sera acceptée.
Le poète est incorporé au 38ème régiment d’artillerie de campagne à Nîmes, puis transféré dans l’infanterie comme sous-lieutenant et affecté, le 18 novembre 1915, au 96ème Régiment de ligne. Il connaît la vie des Poilus, dans la tranchée, face à l’ennemi. Le 12 janvier 1916, il rejoint à Damery son régiment qui fait mouvement, par étapes, vers le Bois des Buttes. Le 22 février le régiment atteint Fismes où il cantonne. Début mars, Apollinaire passe deux jours dans Reims bombardée. Par décret du 9 mars 1916, il est naturalisé français.
Le régiment doit cantonner à Roucy ou Ventelay quand, le 14 mars 1916, le lieutenant Apollinaire monte en ligne avec son unité au Bois-des-Buttes, à l’extrémité Est du plateau de Craonne.
Le 17 mars vers 16 heures, un éclat d’obus après avoir percé son casque, le blesse à la tempe alors qu’il lisait le Mercure de France. Le 18 mars, évacué par l’ambulance la plus proche (Roucy ?), le blessé est opéré à 2 heures du matin, car son état nécessite une trépanation. Le 20 mars, il est dirigé sur l’Hôtel - Dieu de Château-Thierry. Le 28 mars, il est évacué vers le Val-de-Grâce. Il restera handicapé jusqu’à sa mort et affaibli physiquement suite à l’inhalation sur le front des gaz asphyxiants.
Apollinaire en 1917.
Atteint par la grippe espagnole, il décède le 9 novembre 1918. Il est inhumé le 13, au Père-Lachaise, tandis que les Parisiens fêtent l’armistice.
La stèle en hommage à Apollinaire
L’écrivain Yves Gibeau fera élever, près de la Ville-aux-Bois-lès-Pontavert, une stèle en mémoire du poète.
Les fusillés
Le 30 avril 1916 une mutinerie éclate à Roucy. Quatre soldats de la 2e compagnie du 96e RI (le régiment de Guillaume Apollinaire), Lucien Baleux, Félix Milhau, Paul Regoudt et Emile Lhermenier, ont refusé pendant une heure de remonter aux tranchées. Ils sont condamnés à mort, le 22 mai 1916, par le conseil de guerre de la 55e division et fusillés le 23 mai à Roucy, près de l’ancienne entrée du château. Ils reposent à la nécropole de Pontavert.
"Les quatre fusillés de Roucy"
Après l'effroyable hécatombe de printemps sur le Chemin des Dames et les permissions étant refusées à son bataillon, le caporal Joseph Dauphin, du 70e BCP et plusieurs soldats qui l'accompagnaient ramassèrent une cuite mémorable. Sous l'effet de l'alcool ils auraient tiré quelques coups de fusil et lancé à la cantonade des propos séditieux. Une fois dégrisés et conscients d'avoir fauté, Dauphin s'attendait à récolter quelques jours de prison, mais ses supérieurs l'envoyèrent devant le Conseil de guerre. Condamné à mort le 6 juin 1917, il sera fusillé le 12 juin à la ferme du Faité à Ventelay. Il repose dans la nécropole de la Maison Bleue à Cormicy. Incorporé au 70e BCP il avait été nommé caporal en mars 1915 pour sa belle conduite au feu et cité à l'ordre du régiment et décoré de la Croix de Guerre avec étoile de bronze.
A Brouillet (20 kms au Sud de Roucy) lors d’une manifestation du 313e RI. Le soldat Henri Désiré Valembras frappe un capitaine. Il sera condamné à mort et fusillé le 13 juin 1917 à l’aube sur le plateau des Casemates près de Craonne puis son corps transféré à Roucy. Il repose à la nécropole de Pontavert.
La première offensive blindée
La première attaque de chars menée par la France est fixée au 16 avril 1917, entre Corbeny et Berry-au-Bac, là même où César avait déployé ses Légions. Ils sont engagés en deux colonnes. Le groupement du commandant Bossut comprend 82 chars Schneider tandis que le groupement Chaubès parti de la ferme du Faité passe par Roucy équipé de 50 chars Saint-Chamond et se dirige vers le bois de Beaumarais.
Trop lourds, les engins s'embourbent rapidement, et trop vulnérables, leur réservoir n'étant pas protégé, ils sont des cibles faciles pour l'artillerie allemande. Cet échec vient accroître le désastre de l'offensive Nivelle.
Photo prise, à Juvincourt, par un soldat allemand après l'attaque des chars du 16 avril.
Cimetière militaire.
Pendant la guerre 14-18, un cimetière militaire abritait les corps des soldats français et alliés. Les corps des soldats français ont été transférés à la nécropole de PONTAVERT. Les britanniques sont au cimetière britannique de SISSONNE.
Roucy reçoit la Croix de Guerre
La commune de Roucy a été décorée de la Croix de Guerre le 17 octobre 1920.
La fin du château
En novembre 1908, Gérard-Henri-Gaston de Néverlé achetait à la baronne de Vangeheim, héritiére du comte d’Imécourt, le château et l’hospice de Roucy. Le comte de Néverlée fut tué devant Craonne le 22 mai 1917 pendant l’offensive du Chemin des Dames. Le château, bien que peu endommagé fut démoli par sa propriétaire Madeleine Picot de Vaulogé, veuve du comte.
Le château vers la fin de la première guerre mondiale.
L’entrée actuelle, en haut de la rue du Pavé, donnait à l’époque sur la face Sud, à l’arrière du château. La grille que l’on peut encore y voir était celle de l’entrée principale. Elle a été transférée et réinstallée par M. Julien BERNARD, ancien forgeron et maréchal-ferrand à Roucy.
Les deux entrées du château avant le transfert de la grille.
Les églises
L'ancienne église avant la guerre 14-18
Complètement détruite en 1917, l’église de Roucy était un édifice peu homogène. Constitué par deux parties bien distinctes, la plus ancienne du XIIe-XIIIe siècle.
D’abord un long et large bâtiment rectangulaire aux parois nues, percées de quelques petites fenêtres de chaque côté.
L’autre partie de l’église appartenait au style ogival du XIVe siècle. Elle était construite sur le plan carré, avec deux nefs de chacune deux travées.
Une tour large et massive s’élevait au-dessus de la travée du chevet Nord-Est de l’église. A l’intérieur de la tour était un beffroi de charpente supportant deux cloches.
A l’extérieur de ce bâtiment étaient suspendus deux grands crochets d’incendie qu’on pouvait atteler chacun de deux chevaux avec lesquels on faisait écrouler la chaumière incendiée ou ses voisines, afin d’enrayer la propagation du sinistre.
Entre la rue montant vers Ventelay et le chevet de l’église, séparé par une ruelle, était la salle des pressoirs banaux du château. Elle existait encore vers les années 1900.
La nouvelle église
La nouvelle église fut reconstruite par l'entreprise Laborderie, Prado et Minaud sur les plans de l'architecte Raoul Drouin-Deligne. Elle fut inaugurée le 31 mai 1931.
Cet article est mis à disposition en l'état. Il sera complété ultérieurement.
Nous espérons qu'il est déjà ainsi, ami lecteur, source d'informations sur notre village.